Réinventer la convivialité à l’heure du Dry January
La convivialité est souvent synonyme de fête en France, et qui dit fête dit alcool. Pour prendre de la distance avec cette habitude, de plus en plus de français se mettent au Dry January, aussi appelé Défi de Janvier. Le challenge : ne pas boire d’alcool pendant janvier. Pour les vignerons, les bars, les brasseurs, et toutes personnes vivant de la production et vente d’alcool, cette période est synonyme de perte d’activité. Consommateurs et professionnels se montrent néanmoins innovants pour entretenir cette convivialité autour d’un verre sans inviter mister alcool.

Lorsque la consommation d’alcool rencontre la santé
Rien de nouveau, l’alcool n’est pas bénéfique pour la santé. On estime que 23 000 à 41 000 décès en 2023 étaient dûs à l’alcool (Santé Publique France). A cet effet, Santé Publique France recommande de ne pas dépasser les 10 doses d’alcool par semaine et pas plus de 2 par jour.
En parallèle, on remarque une véritable prise de conscience des Français avec une nette baisse de consommation : -60% par rapport aux années 1960, période à laquelle la consommation était de 200L de vin par an et par personne en moyenne. Les principales raisons expliquant cette baisse : la santé et le bien-être.
L’émergence du Dry January et ses effets sur le marché des alcools
Le concept émerge au Royaume-Uni en 2012 et devient rapidement un challenge mondial. En 2020, il débarque pour la première fois en France et connaît un succès dès la première année. En 2024, 4,5 millions de Français ont relevé le défi. L’idée du Dry January : faire une pause dans sa consommation d’alcool après les fêtes, souvent synonyme d’excès. Les associations de lutte contre les addictions préfèrent néanmoins parlé de « défi de janvier ». L’objectif n’est pas de diaboliser l’alcool mais de prendre du recul sur sa propre consommation ainsi que les nombreuses occasions prétextes pour boire. Cette abstinence entraîne pour une partie des participants un meilleur contrôle ainsi qu’une réduction de leur consommation d’alcool.

Pour les secteurs viti-vinicole, brassicole, des spiritueux et de la restauration, ce défi a de lourds impacts. Déjà confrontés à une baisse de consommation générale depuis plusieurs années, en particulier chez les jeunes, l’arrivée du Dry Januarymarque une période de creux. D’après une étude Lightspeed, on note une baisse de 22% des ventes d’alcool dans les restaurants en janvier 2024, avec en tête les cocktails (-28%) et la bière (-26%). Plus généralement, cette abstinence fragilise l’équilibre du marché. La tendance est donc plutôt à encourager la modération dans ce secteur.

Une adaptation du marché aux nouveaux goûts et aspirations des consommateurs
Pour répondre à ces nouveaux modes de vie plus sains, des boissons naturellement sans alcool se multiplient, tels que les mocktails (les cocktails sans alcool), les kombuchas, les kéfirs, les ginger beers, ou encore les boissons pétillantes aromatisées et permettent de se joindre à la fête. Les plantes, fruits, racines sont les nouvelles sources d’inspirations des partisans des alternatives aux boissons alcoolisées. En témoigne également la création d’un nouveau métier. Avez-vous entendu parlé du sobrelier Benoît d’Onofrio ? Précurseur, il a lancé la Sobrellerie (Paris), un lieu unique où il prépare des boissons complexes et imagine des accords inédits, en toute sobriété.

La culture de l’alcool et en particulier du vin est cependant bien ancrée en France, allant jusqu’à exclure plus ou moins directement ceux préférant rester sobres. Les professionnels ont donc mis au point des vins, bières et spiritueux sans alcool. Dans la législation, une boisson sans alcool est une boisson dont le degré est inférieur à 1,2°, et l’adjectif « désalcoolisé », quant à lui, s’applique uniquement si le degré est inférieur à 0,5°.
Et ce segment explose depuis 5 ans ! En 2023, le vin sans alcool représentait 3% du marché total du vin, équivalent à une progression de 20% des ventes par rapport à 2021. Sur un autre volet, la bière sans alcool a connu une croissance de 147% en 5 ans. Les caves ajoutent des références, des caves sans alcool ouvrent leurs portes à l’image de Sanzalc à Lille, et les restaurants étoffent leur carte voire osent l’accord avec des boissons sans alcool ! Le marché s’adapte à la demande des consommateurs, désireux de préserver leur santé et leur bien-être. La plupart du temps, ces types de produits sont obtenus après une désalcolisation, c’est-à-dire que l’on retire l’alcool du produit initial. L’avantage de ces produits est, pour le consommateur, un moyen de boire du vin ou de la bière ; une manière de s’inscrire dans cette représentation de la convivialité autour d’un verre.